
Inauguration de la cuverie à Meursault
Publié par Armand Heitz leLe 11 avril j'ai inauguré ma nouvelle cuverie réalisée par A&A Heitz Architecture.
Voici la retranscription de mon discours pour revivre ce moment fort.
« Pour capter l’attention, il faut parler de politique, de sexe… et d’architecture. Alors allons-y. »
Les statistiques sont formelles : l’attention humaine ne dépasse pas 5 minutes, surtout quand les verres sont pleins et qu’on a faim. Pour capter la vôtre, je me suis renseigné, c'est très simple : il faut parler de politique et de sexe. Je vais donc axer mon discours sur la politique, le sexe et pour l’originalité l’architecture.
Politique
Nos politiques ! Ah ! Ils adorent profiter du contexte international tendu pour accaparer les médias et tenter de faire grimper leur cote de popularité. Ils troquent peu à peu leur rôle diplomatique contre un rôle médiatique.
Moi, aujourd’hui, je fais l’inverse : je prends la parole, mais ce projet de cuverie, CE N'EST PAS MOI QUI L'AI FAIT.
Vous reconnaîtrez là une forme d’humilité... à la Jean-Luc Mélenchon.
« Ce projet, je le dois avant tout à ma femme.»
Astrid, l’architecte derrière cette cuverie, assiste au discours de son mari, Armand Heitz.
Un projet conçu à deux, ancré dans leur vision commune.
En 2013, je vinifie mon premier millésime. Je réalise vite que la maison familiale de Chassagne-Montrachet ne pourra pas accueillir les 30 hectares de vignes qu’on exploite aujourd’hui. Meursault est un village central dans l’histoire de la famille Lochardet, il se trouve au cœur des parcelles que mon grand-père a su préserver.
Jean-Claude Monnier me propose ce terrain. Un poteau électrique au milieu, quelques gens du voyage, bref… personne n’en voulait.
Je lui demande : « On construit autour du poteau ou des gens du voyage ? »
Il me répond : « Le poteau. On peut imaginer une cuverie qui s’organise autour. Les gens du voyage, j’en peux plus à Meursault. »
C’est là que je me suis pris pour Trump : il faut négocier. Mais pas pendant 90 jours, hein. Je remercie Jean-Claude pour sa diplomatie. Grâce à lui, on est là aujourd’hui.
Sexe (enfin… presque)
En 2016, je rencontre Astrid. Et vous ne devinerez jamais, elle est architecte ! Mais je vous assure que c’est avant tout son charme et ses yeux bleus qui m’ont séduit.
En plus, elle vient de Gevrey-Chambertin (oui, en Côte de Nuits... sacrilège). Bon, je ne suis pas le seul vigneron de Chassagne à avoir cherché la diversité génétique et culturelle là-bas.
Dès notre troisième rendez-vous, je décide de passer à l’acte ! Hummm. Je lui parle de mon projet de cu(l)verie (et oui, il ne fallait pas mettre la charrue avant le bobard).
Elle me recadre : « Œnologue, ingénieur agro, oui. Mais architecte, Armand, tu ne l’es pas encore. »
Avant même les discours, c’est Ravel qui ouvre les festivités
Astrid a de la poigne, elle entame alors mon éducation architecturale : Tadao Ando, Le Corbusier, Peter Zumthor, mais surtout Rudy Ricciotti.
Le beau, la brute et le truand
L’exil de la beauté
Le béton en garde à vue
L’architecture est un sport de combat
Je me régale de ces lectures.
En 2018, on se marie.
En 2019, on fonde l’agence A&A Heitz Architecture.
Et oui : jamais d’associations avant le mariage.
Neuf mois plus tard, la cuverie est en gestation. Mais c’est finalement le Château de Mimande qui nous tombe dessus comme un coup de foudre.
Investir dans l’œnotourisme en plein COVID, il fallait oser.
La cuverie des blancs
En 2022, réunion annuelle avec les partenaires bancaires.
Jean-Loïc Lagrange me dit : « Cette cuverie est une bonne idée, mais peut-être plutôt pour l’année prochaine, Monsieur Heitz ? »
Non.
Dépenser l’argent c’est beaucoup plus facile que de le faire rentrer. Mais une parole est une parole. Nous décrochons l’emprunt en 2023, nous attaquons les travaux dans la foulée.
Trois principes pour une architecture juste
Après ce volet politique et sexuel, je vais être soft et un peu technique. Soyez attentif, s’il vous plaît, Dimitri notre chef a pour ordre de ne pas servir le bœuf bourguignon avant la fin de mon discours.
Voici 3 axes qui ont permis d'aboutir à ce bâtiment.
- 1. Le bon sens paysan
Je dis souvent que le bon sens paysan est le meilleur des labels. Ce bon sens paysan, c’est mon grand-père qui me l'a transmis. “Je me souviens avoir échangé des terres à vache contre des terres à vignes” me disait-il. Je l’ai pris au pied de la lettre.
Ces souvenirs d’enfance nous ont permis de définir le cahier des charges pour cette cuverie : Si mon grand-père avait fait une cuverie comment l'aurait-il faite ?
La tante d’Armand et sa maman, fières et émues, découvrent la nouvelle cuverie.
- 2. L’esthétique
Astrid et moi pensons que la plus belle des formes est celle qui trouve l’équilibre entre nature et main de l’homme. L’esthétique doit donc être définie par le choix des matériaux et le respect de règle de proportion.
Proportion, simplicité, lisibilité. C’est le nombre d’or qui nous a permis de définir les proportions du bâtiment.

Une cuverie durable, construite avec amour et convictions.
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3. Les matériaux
– Le béton
Si vous n’êtes pas un spécialiste du courant brutaliste, il y a un film avec Adrien Brody au cinéma. Je vous le déconseille : 3h30, c’est plus long que mon discours et le scénario n’est vraiment pas terrible. Le béton en garde à vue de Rudy Ricciotti ou le film Playtime de Jacques Tati sont des inspirations que je vous recommande d’avantage. Quoi de plus local et durable que le béton qui est constitué de granulat, de calcaire et d’eau.
– Le bois
Nous avons opté pour de l'épicéa pour la charpente et du douglas jurassien pour les menuiseries. Il fallait bien que je laisse quelques merins à nos voisins de la tonnellerie Damy ou à nos voisins de Mimande, la famille Chassin. Outre la charpente nous avons isolé le bâtiment avec 20 cm de laine de bois en mur et 30 cm en toiture. L’idée était la suivante : isoler plutôt que de réguler.
« Voilà comment nous avons imaginé et conçu une cuverie terroir sans filtre. »
Parce qu'en Bourgogne on ne trinque pas sans un ban bourguignon
Remerciements
Je garde évidemment le plus important pour la fin : les remerciements
- Astrid, bien sûr
- Julien Jousse, qui suit les projets de l’agence A&A Heitz Architecture
- Ma famille, qui m’a fait confiance dès mon premier millésime
- L’équipe du domaine Armand Heitz
- Tous les artisans et entreprises locales qui ont rendu ce chantier possible :
Rougeot pour le terrassement
SNEP pour le gros œuvre
Lepagnier pour la charpente bois et menuiseries intérieures bois
Blondeau pour la charpente métallique
Baux pour le bardage et les couvertures
G1 Fermetures pour les menuiseries extérieures aluminium
Vaginet pour le ravalement de façade
Laurent Labille pour la plâtrerie et la peinture
SIXM pour le CVC
Sochaleg pour l’électricité
ADS pour le monte-charge
Stonhard pour la résine de sol
Paysage 2000 pour les clôtures
CM Rossignol pour la serrurerie
Je tiens également à remercier tous les partenaires du domaine que je n’ai pas cité mais qui travaille à nos côtés au quotidien.
Armand
- Tags: architecture, bourgogne, patrimoine, terroir