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Armand Heitz patures avec les vaches

Du vin, des légumes et de la viande !

Publié par Armand Heitz le

Après les vignes et Loaris, notre jardin en permaculture, nous voulons aller plus loin dans notre démarche de polyculture et de circularité. Notre terroir ne se limitant pas uniquement aux vignes, nous faisons le choix de compléter notre offre de vins et de légumes avec de la viande. Notre élevage est composé de bovins de races charolaise et salers. Rencontre avec Armand sur le sujet.

« Tout part de l'agronomie »

 

Après le vin, les légumes, tu te lances dans l’élevage et la production de viande. Pourquoi ?

En biodynamie, on parle énormément des bienfaits de la vache. Pendant des décennies, pour gagner en productivité, nous avons détruit la diversité de nos paysages. Pour essayer de compenser cela, on doit asperger nos vignes d’une préparation biodynamique, la bouse de corne 500, qui n’est autre qu’une bouse de vache renforcée par des forces telluriques. Au lieu de ces subterfuges pas vraiment naturels, nous ferions mieux de nous attacher à reprendre le problème à la base. Il y a vraiment une importance primordiale à réintégrer l’animal au cœur d’une exploitation afin d’obtenir un cercle vertueux. Il consomme l’herbe ou les insectes nuisibles et restitue au sol un maximum de microbiologie avec ses déjections, il recycle nos déchets, il contribue à la sélection naturelle. Chaque ferme en polyculture possède des animaux, et c’est clairement l’évolution que nous souhaitons au domaine.

Quel est l’apport principal de cette diversification ?

En permaculture, on parle systématiquement d’associations de cultures. Par exemple, la tomate et le basilic, une fois associés, deviennent pratiquement autonomes. C’est cette diversification qu’il faut recréer au sein de nos paysages. Une politique de remembrement a été instaurée après la guerre pour industrialiser et mécaniser l’agriculture. Nous devons sortir de cette conception de monoculture, que ce soit pour la vigne ou autres. C’est ce qui tue la diversité et qui est le cœur de notre problème actuel. Mon rêve est de pouvoir réintroduire des animaux, des arbres, aromatiques et autres, au sein de nos parcelles.

Photographie noir et blanc vaches paturent dans un pré

Est-ce possible actuellement ?

Le vignoble bourguignon, à cause de son grand morcellement, ne s’y prête malheureusement pas très bien. Mais nous avons commencé à développer ça et nous allons continuer. Nous avons assez de connaissances agronomiques aujourd’hui pour savoir que seul un écosystème diversifié peut prétendre être équilibré. Pasteur disait que le ravageur n’est clairement pas la problématique, seul son environnement compte. On a un bel exemple en ce moment avec le covid... L’homme se prétend encore plus fort que la Nature en souhaitant maîtriser son évolution grâce à la chimie ou la technologie, et je pense que nous faisons une grave erreur.

L’origine de cette démarche est d’abord agronomique ?

Tout part de l’agronomie. J’ai commencé par travailler pendant 7 ans en biodynamie. Je n’ai pas obtenu les résultats escomptés sur l’amélioration des cultures, sur la philosophie, sur la relation avec l’équipe du domaine et même sur le discours commercial à présenter aux clients. Je n’ai pas réussi à trouver les équilibres naturels que je voulais avec ce système de production. J’achetais de l’engrais, des produits de traitement, tout ça pour courir après un label qui ne me faisait clairement pas rêver. Mes recherches agronomiques et bibliographiques m’ont conduit vers la permaculture notamment, et tout a repris du sens à ce moment-là.

Vaches salers élevage Armand Heitz

Tu parles d’achat d’engrais, de produits de traitements, dans le système agricole actuel, il y a une grande dépendance à ce genre de ressources externes. Comment s’en détacher ?

Aujourd’hui, les semences des cultures sont produites par des organismes privés ou publics qui gagnent de l’argent en nous vendant certaines espèces. Ils les ont sélectionnés pour répondre à un marché mondial, avec comme but de produire le plus possible, à moindre coût. Ces semences clonées sont très fragiles, nécessitent l’utilisation de machines et de chimie. Du fait de leur composition et du mauvais état de nos sols, elles nécessitent des engrais et des traitements. Pas de problème, semences, engrais et traitements sont vendus par les mêmes personnes ! Ce système vicieux est assez incroyable. Comment Bayer est-il encore autorisé à faire de la publicité en 2021 ? Je ne suis pas José Bové mais il y a des jours où je me demande si je ne dois pas me laisser pousser la moustache. Et après t’avoir fait cultiver de la merde, c’est encore eux qui vont tirer le prix de ta récolte au plus bas afin de pouvoir concurrencer des pays comme le Brésil qui cultive encore plus salement qu’en France. La Nature a largement plus de solutions à nous offrir que ces financiers peu scrupuleux. Nous ne voulons plus dépendre de ces groupes industriels qui vont ensuite essayer de s’offrir une bonne conscience à coup de marketing et de labels.

Tu peux te libérer de Bayer et consorts ?

Nous avons réussi à Loaris, grâce à notre aménagement paysager, à nous libérer complètement des contraintes chimiques. Pour nos semences, nous avons un catalogue à ciel ouvert, qui est la Nature. Par contre, pour les cépages à disposition en viticulture, et les variétés en élevage, c’est impossible. En Bourgogne, on ne peut pas planter des cépages résistants par exemple à cause des AOC. Mais j’ai déclassé volontairement une parcelle pour pouvoir planter l’année prochaine un cépage résistant. Dans le Beaujolais, c’est plus ouvert, et nous avons déjà commencé avec des plantations de Vidoc et d’Artaban. Notre projet, c’est de tendre vers de l’autonomie. Limiter les intrants au maximum ! C’est le mot d’ordre, que ce soit en viticulture, à Loaris, notre jardin en permaculture, et à la ferme. Et c’est déjà quasiment le cas pour la viande. Les pâtures, les champs, produisent tous les aliments des vaches, eau comprise. On travaille sur l’empreinte carbone mais il n’y aura pas grand-chose à faire à ce niveau-là. Nous allons pouvoir nourrir une partie de population avec un impact environnemental quasi neutre ! On est loin de McDonald’s ou Carrefour...

« Pour être sain, il faut manger sain »

 

Est-ce que produire de la viande peut améliorer ta manière de faire du vin ?

Ce qui est intéressant selon moi, c’est que l’on rencontre les mêmes problématiques dans l’élevage et la viticulture. Il y a eu, à un moment donné, un arrêt de l’évolution de l’espèce et de la génétique décrété par des organismes privés ou publics. Pour la vigne, en 1960, les AOC ont décidé de se fixer sur le chardonnay par exemple, de le cloner, et stopper l’évolution naturelle. La production de variétés et de clones est maîtrisée par l'IFV qui prélève des royalties sur chaque plant de vigne vendu. C’est un organisme public, englué dans l’administratif que vous pouvez imaginer, donc il ne se passe rien. Les vignes sont fatiguées, non résistantes aux maladies, alors que si on avait laissé la Nature évoluer, ça ne serait certainement pas le cas. Le constat est le même dans l’élevage, avec les différentes races : charolaise, salers, etc. Il y a au moins 6 ravageurs contre lesquels les animaux doivent être vaccinés. Pour moi, une bonne viande, un bon vin, c’est avant tout une plante ou un animal qui n’a pas eu besoin de chimie, de traitements, de vaccins. Un bon produit est un produit qui a été cultivé de manière durable. Aujourd’hui, au vu de ces problématiques, on ne peut pas vraiment parler de bon produit et de produit durable.

Du vin, des légumes, des fruits, de la viande. Il y a de quoi faire un repas complet ! Tu vas finir par concurrencer Carrefour.

Pour être sain, il faut manger sain ! C’est notre combat au domaine. Nous avons malheureusement pris de mauvaises habitudes. Mais ces habitudes sont en train de nous tuer ! Obésité, microparticules de plastique, asepsie alimentaire, pauvreté énergétique des aliments que l’on consomme, cancer... Il y a bien un moment où l'on va se réveiller, non ? Tout d’abord, il y a énormément de produits que nous pensons indispensables dont nous pouvons aisément nous passer. En plus d’être économique, nous irions beaucoup mieux sur le plan de la santé. Il faut aussi se concentrer sur l’essentiel. C’est clairement un choix de société et de mode de vie. Tu préfères prendre 20 minutes pour te faire des pâtes maison avec la farine du meunier du coin, en discutant de ta journée avec ta femme et tes enfants ? Ou bouffer tes Panzani fabriqués avec des farines de merde que tu vas tenter de digérer en regardant les seins refaits d’une candidate des Ch’tis à Ibiza ? La question est vite répondue mais si tu as un doute, on en reparle quand tu auras chopé ton premier cancer ou que tu auras claqué ton PEL pour te payer une télé encore plus grosse que ton mur.

Armand Heitz défie la grande distribution Carrefour

La viande est un sujet sensible de nos jours. La traite des animaux, les divers scandales, les végans qui attaquent des boucheries. Que penses-tu de tout ça ?

Quand on voit des abattoirs industriels, des bêtes qui ne voient jamais le jour, mal nourries, qui parcourent l’Europe entière, il n’est pas étonnant de voir des extrêmes qui sortent, que des gens disent stop. Il y a un million de bovins mâles qui sont exportés en Italie car ils ont des meilleures sources d’approvisionnement pour engraissement, pour ensuite être revendus en viande hachée Charal, McDonald’s et consorts. Revenons aux valeurs naturelles : un pré, une vache qui va manger sainement, pour être mangée sainement. Je comprends qu’il y ait des personnes qui ne veulent pas manger d’animaux mais nous sommes omnivores. J’en reviens aussi à l’agronomie et ce que je disais au début, une pâture sans animal est une pâture qui est vouée à disparaître. Je dis non à l’élevage industriel mais oui à un élevage raisonné. Je serais ravi de pouvoir échanger avec des végans.

Qu’est-ce que tu penses pouvoir apporter à la production de viande ?

De l’autonomie, du respect de l’animal par son alimentation, la gestion de l’élevage en pâture, de la transparence, des circuits courts, montrer aux consommateurs la véritable qualité d’une viande élevée. Quand on voit la dernière promotion de Carrefour, une côte de bœuf à 9,50€ le kilo, c’est du déstockage malsain ! Le consommateur ne comprend rien à la qualité car il n’y a aucune transparence sur cela, il se réfère uniquement à l’histoire, à la légende qu’il y a derrière. Les industriels de l’agroalimentaire se nourrissent de la peur du consommateur et de sa méconnaissance pour lui vendre de nouvelles saloperies bio, sans gluten, etc. Là encore, c’est un cercle totalement vicieux. Nous souhaitons produire dans un cercle vertueux en expliquant et montrant ce que nous faisons. Reconnectons-nous à la nature !

 

Propos recueillis par Fabrice Pastre

Photographies : @jibpeter

 

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