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Fleurs dans le jardin en permaculture Loaris

La guerre des fèves

Publié par Armand Heitz le

Un jeudi, dans les derniers jours du mois de juin. Le soleil se tient haut sur Loaris, notre jardin en permaculture. Les dernières gelées sont loin, toute une verdure est venue depuis quelques semaines, elle porte ses fruits sous terre ou à bout de bras, mais dans un seul élan tourné vers la lumière.

Entre les panais, les courgettes, les betteraves, les salades et les artichauts s’élève le champ des fèves. Ce jour-là, il n’y a pas un brin de vent, l’air est immobile. Le calme ? Approchez-vous, regardez bien. Un terrible envahisseur fait son chemin, déjà nombreux, vorace, qui pique la plante pour se nourrir de sa sève : le puceron.

Attaque de pucerons sur les fèves jardin permaculture

C’est un guerrier redoutable, colonisateur légendaire de la famille des Aphididae. Hyper-prolifique parce que les femelles n’ont pas besoin de mâles pour se reproduire, et que leur progéniture naît gravide : les bébés pucerons sont déjà prêts à se reproduire. En quelques jours, les fèves plient sous le poids de l’oppresseur.

Deux stratégies s’offrent à nous : foudroyer les importuns à coups de pulvérisations de savon noir, très efficace mais temporaire, puisque les pucerons reviendraient quelques jours plus tard.  Ou alors observer seulement, et vérifier que la nature fait bien les choses. Car de nouvelles armées surgissent. Les coccinelles parées de boucliers rouges, jaunes ou noirs à pois. Elles dévorent une cinquantaine de pucerons par jour, leurs larves en consomment deux cents ! Viennent ensuite les Syrphes, parées de cuirasses rayées de jaune et de noir. En dix jours de croissance, leurs larves engloutissent quatre cents pucerons.

Coccinelles mangent pucerons sur fèves jardin permaculture

Derrière, les terribles petites guêpes parasitoïdes, du genre Aphidius, qui pondent dans les pucerons. Leurs larves s’y développent, tuent le puceron, y tissent leur cocon. Ces terribles hoplites sont sans pitié.

À terme, la guerre des fèves ne sera jamais complètement remportée par les prédateurs de pucerons, mais l’envahisseur, n’en viendra pas à bout non plus. Ces fèves représentent un enjeu de taille dans la permaculture : en attirant les pucerons en grand nombre, elles font venir leurs prédateurs qui s’installent durablement dans le jardin, leur subsistance étant assurée. Une fois en place, les coccinelles et les syrphes assureront la protection d’autres cultures qui pourraient subir les attaques de pucerons : les courgettes, les salades, les choux sont sous bonne garde.

Syrphes, coccinelles et pucerons dans les fèves jardin en permaculture

L’équilibre nécessaire au maintien de toutes formes de vie peut être difficile à maintenir dans une culture, il est fragile. Si les prédateurs de pucerons tardaient à s’installer, la récolte de fèves serait compromise. Il est donc préférable de bien les accueillir, par exemple en n’utilisant pas d’insecticides, en laissant croître les fleurs sauvages riches en pollen, en variant les cultures pour élargir la période de floraison. Les syrphes sont de remarquables pollinisateurs.

Chaque épisode, chaque saison de travail dans les vignes ou le jardin de Loaris nous enseigne qu’il vaut mieux travailler avec la nature, et jamais contre elle.

 

Blandine Bacconnet

 

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