Rencontre avec Hélène Cellar
Publié par Armand Heitz leHélène Postadjian travaille à la Cave des Tournons, située à Charnay-lès-Mâcon. Une cave et également un bar à vins avec une superbe sélection, plus de 1000 références, parmi lesquelles la Bourgogne et le Mâconnais sont bien représentés. Hélène publie régulièrement sur Instagram (@helenecellar) et Vivino (Hélène postadjian Kowarski) ses "mémoires gustatives d'une caviste", des notes précises et argumentées de ses dégustations.
L'interview "Beaujolais Nouveau"
Pouvez-vous nous décrire comment vous dégustez ce Beaujolais Nouveau ?
Je déguste ce Beaujolais Nouveau d’abord seul, pour être attentive à tous les arômes, dans mon verre Zalto universel (qui m’accompagne pour toutes mes dégustations, ou un de ses frères des autres gammes). Puis, après l’avoir découvert sous toutes ses coutures, je vais l’associer avec des rouleaux de printemps et un fromage. Je trouve qu’il développe beaucoup de puissance au nez avec des épices qui dominent. La bouche est très concentrée, il ressemble davantage à un Cru qu’à un Beaujolais Nouveau, par son extraction. Mais cela change.
Comment trouvez-vous l'étiquette ?
Je trouve que l’étiquette ressemble bien à la typographie des autres cuvées d’Armand Heitz ! Je la trouve jeune, elle fait ressortir beaucoup de dynamisme par son nom aussi, qui n’est pas « Beaujolais Nouveau » mais « Nouveau Beaujolais », ce qui colle assez bien à mes impressions en bouche qui relèvent plus du cru que du primeur ! Et qui promettent un futur intéressant pour cette cuvée...
Vous travaillez comme caviste à la Cave des Tournons à Mâcon, comment vivez-vous cette période difficile ?
Nous avons la chance de travailler contrairement à d’autres commerces. Cette période est particulière, où aucun jour ne se ressemble, où il n’y a pas vraiment de vérité pour l’activité commerciale, c’est en dent de scie. Mais on ne se plaint pas ! Le Beaujolais Nouveau, contrairement à ce que l’on imaginait, a eu beaucoup de succès. Les clients, qui, habituellement le fêtaient dans les bars et les restaurants, n’ont pas oublié les cavistes et ont continué à perpétuer les traditions !
Vous postez vos dégustations sur Instagram et Vivino notamment. Trouvez-vous que le partage via le digital est complémentaire de celui dans la vraie vie ?
Oui je pense que c’est complémentaire, hors partage direct avec les clients et les passionnés, quand on peut les rencontrer. Les réseaux sociaux prennent une place importante dans la vie des jeunes. Je trouve que pour le vin, au-delà de véhiculer une image assez élitiste, les réseaux sociaux permettent à des amateurs débutants, mais ayant la curiosité, de démarrer un dialogue. Car il s’avère malheureusement que les gens ont parfois peur de pousser la porte d’une cave car « ils n’y connaissent rien ». Les réseaux permettent de partager en « déculpabilisant » les gens de ne pas y connaître grand chose ! On commence tous par là, l’important c’est d’avoir la curiosité, et en cela Instagram et Vivino sont de bons moyens de véhiculer la culture du vin qui est très prégnante en France !
Comment vous est venue votre passion pour le vin ?
Ma passion pour le vin est venue par mon père, un grand amateur ! J’ai rapidement goûté, dès mes 15 ans (seulement en sentant ou en trempant les lèvres et en crachant évidemment). Au début, je préférais les vins moelleux (je pense plus facile à aborder pour un palais de novice) puis ma curiosité m’a vite amenée à toujours goûter des vins différents. À partir de là, la passion était née, et j’ai ensuite entamé une formation de caviste en 2017. Et je ne pense pas m’arrêter au seul métier de caviste, enfin je l’espère !
Quel regard portez-vous aujourd'hui sur l'image des vins du Beaujolais aujourd'hui ?
Je trouve que c’est une région très dynamique qui n’en finira pas de nous surprendre dans les années à venir (et celles passées évidemment). On y trouve beaucoup de vins natures très bien faits. Des vins de garde et complexes. Il y a de larges nuances de Gamay vinifiées par des vignerons passionnés et amoureux de leur région ! Petite anecdote, il y a un an, un ami m’a envoyé une bouteille à l’aveugle … je la goûte, me dit que c’est un vieux pinot sûrement issu des terroirs de la Côte de nuits… j’y croyais, mais non c’était un Morgon 1995 de chez Lapierre ! Impressionnant, d’une finesse folle, ça pinotait, il avait la finesse des vieux bourgogne rouges… comme quoi, ne jamais dire qu’un gamay ne vieillit pas ! Tout ça pour dire que les vins du Beaujolais réservèrent beaucoup de surprises !
Quelle est votre appellation favorite du Beaujolais ?
Question impossible ! J’aime beaucoup de crus du Beaujolais ! Morgon, Fleurie, Chiroubles, Brouilly… bref je trouve que toutes ont leur charme leur typicité que je ne saurais classer… Par exemple, on apprend à apprécier Chiroubles quand on découvre le terroir et quelques parcelles très escarpées, on lui trouve beaucoup de finesse avec une certaine austérité qui ne manque pas de charme ! On m’appellera ici indécise, car choisir c’est renoncer… 😇
La tradition du Beaujolais Nouveau pour vous, c'est ?
Pour moi, ce sont des moments de partage (qui se sont perdus cette année, mais pour mieux se retrouver l’année prochaine ?). Des moments festifs dans les restaurants ou les bars qui rassemblent des amateurs de tous horizons ! Pour moi, cette tradition est fédératrice et festive. Et j’espère qu’elle continuera de perdurer encore longtemps !
Il vous plaît, celui-ci ?
Pour avoir dégusté quelques beaujolais nouveaux, ce Nouveau Beaujolais est hors norme. Je lui trouve des arômes anisés au nez, avec une concentration assez impressionnante ! La texture en bouche est vraiment soyeuse, où les fruits noirs concentrés dominent et épicé à souhait en finale. À l’aveugle, je ne vous aurais jamais dit que c’était un primeur, ça c’est sûr !
Pour finir, vous avez un remède miracle pour le lendemain du Beaujolais Nouveau ?
Mon remède miracle ? De l’eau, beaucoup d’eau, avec un peu de thé noir et on redémarre la journée comme si de rien n’était !
Propos recueillis par Fabrice Pastre
- Tags: interview