Le travail des sols en viticulture
Publié par Armand Heitz le“J’ai réalisé mon premier millésime en 2013, je travaillais alors en biodynamie. Après 5 ans, je me suis rendu compte que l’état de santé de mes sols ne s’améliorait pas, très vite asséchés et j’avais toujours besoin de beaucoup traiter contre les maladies.
Je me suis alors posé beaucoup de questions, j’ai fait des recherches et je me suis penché sur la permaculture et l’agroécologie. Révélation. Il faut traiter les problèmes à la base et revenir aux principes fondamentaux de l’agronomie. Après 3 ans, le constat est sans appel. Je cherche à travailler en m’adaptant plutôt qu’en luttant. Mes sols sont en meilleure santé, j’utilise moins d’intrants et la qualité des vins est au rendez-vous.”
Revenir à la base
Il y a quelques semaines, nous vous présentions pourquoi et comment travailler avec les plantes bio-indicatrices. Ce travail a pour but d’analyser les sols grâce aux plantes présentes. C’est la première étape pour adapter le travail du sol en fonction de chaque parcelle.
Comme tout part du sol, il est important d’analyser, d’étudier et d’adapter le travail à la particularité de chaque terroir. Pour augmenter la vie et la biodiversité dans les sols, nous faisons le choix de travailler avec différents mulchs et différents enherbements.
Les mulchs
Un mulch est une couche protectrice que l’on va venir ajouter sur un sol pour limiter l’érosion, conserver l’humidité, limiter la levée des plantes et ramener de la matière organique. Au domaine, le mulch choisi est du BRF (bois raméal fragmenté), et il est travaillé de deux façons en fonction du sol sur lequel il est déposé.
Dans les Chevalier-Montrachet et les Meursault 1er Cru Perrières, l’idée est d’apporter une couche de sol supplémentaire à ces coteaux calcaires où la roche mère est proche de la surface. Avec les différents travaux du sol, ces coteaux étaient secs, érodés et inertes. Grâce au mulch, il y a 15 cm de plus pour que la vie se développe. La fraîcheur et l’humidité sont conservées même en période de sécheresse et le travail du sol n’a plus lieu d’être. L’autre avantage de ce mulch est que la levée de dormance de certains végétaux qui pourraient venir concurrencer la vigne est limitée.
Sur les parcelles de Chassagne-Montrachet 1er Cru Tête du Clos et Chassagne-Montrachet 1er Cru Chenevottes, le mulch a été en partie incorporé au sol. Ici, il y a moins d'effets sur la non levée de dormance de certains végétaux concurrents mais tous les autres effets sont encore présents.
La pose de ces mulchs entraîne une énorme diminution des travaux des sols. Notamment moins de passages de tracteurs qui tassent les sols et détruisent la vie dans ces derniers. Diminuer les labours permet également de réduire drastiquement le dégagement de CO2. Notre mulch est alors le point de départ d’un cercle vertueux qui améliore à la fois la vie des sols et immobilise le carbone responsable du réchauffement climatique.
Les enherbements
Au sein de nos parcelles, les enherbements sont travaillés avec des objectifs bien précis : décompacter le sol, produire de la matière organique et mycorhizer les sols. L’objectif est de créer un noyau de vie qui va fonctionner en synergie avec le cycle de la vigne. Si ce travail est bien réalisé, plus besoin d’engrais, il y a juste besoin de tondre.
Un travail important de recherches et d’analyses agronomiques est réalisé. La mise en place d’une rotation précise des enherbements est importante pour que l’impact de chaque plante intervienne au bon moment du cycle de la vigne.
Pour donner un exemple du travail effectué, plusieurs espèces ont été semées sur la même parcelle à Pommard : de la luzerne, de la moutarde d’Abyssinie et du seigle fourrager. La luzerne va apporter de l’azote, permettre d'acidifier les sols et développer les micro-organismes. La moutarde d'Abyssinie est une crucifère qui s'implante facilement et possède un système racinaire permettant de décompacter et aérer le sol. Enfin, le seigle fourrager constitue un apport important de biomasse. Avec toutes ces plantes et leur association, le sol obtenu est un sol vivant, pour de vrai.
Les vivaces
En 2020, plusieurs parcelles de vignes à côté de Loaris ont été plantées. Un essai de plantation de vivaces a été fait sur l’une d’entre elles. Ces vivaces poussent plutôt dans le sud de la France. Elles n’ont pas besoin de beaucoup d’eau pour se développer faisant ainsi peu de concurrence hydrique aux vignes. Du thym, romarin, menthe poivrée, sarriette et de la consoude ont été plantés. L’idée est la même qu’avec les enherbements, augmenter la biodiversité et décompacter les sols. Nous misons également sur l’effet des essences de ces plantes pour équilibrer naturellement la pression des ravageurs de la vigne.
Finalement, mettre un enherbement pour mettre un enherbement ce n’est pas vraiment utile. Pour avoir un réel impact, cela demande de la réflexion, de l’analyse et du temps, et c’est dans cette optique que le domaine souhaite aller.
Léo Plassard
- Tags: nature, permaculture, vigne & vin