Armand Heitz x Brasserie de France
Publié par Armand Heitz leÇa y est, Armand Heitz entre dans le monde de la bière. C’est curieux n’est-ce pas ? Et comment va-t-il faire, il n’a pas le matériel, c’est un investissement massif de s’équiper ainsi. Oh, qu’entends-je ? La Brasserie de France se lance à Beaune, un appareil productif neuf dont la logistique et les talents sont mis au service d'autres marques.
Certains s’offusqueront, ce n’est pas du tout la philosophie du domaine que de s’associer ainsi avec une structure qui en vient à effrayer certains professionnels du secteur brassicole. Pourtant, croyez-moi, la logique derrière ce partenariat est bien rodée. En effet, ce nouveau projet offre des perspectives qu’assez peu de structures existantes auraient pu offrir. Et je m’en vais dans cet article vous les énumérer et vous convaincre du bien fondé de cette association aux semblants incongrus.
Tout d’abord, il faut connaître un peu la structure de la Brasserie de France pour comprendre que ce nouveau projet a de multiples facettes. En effet, Jean-Claude, Anthony et Paul, trois entrepreneurs venus de différents milieux, ont investi dans cette aventure leur temps et leur argent dans un but : mettre au service de beaux projets des infrastructures et des talents et former les brasseurs de demain. C’est beau, hein ? Loin de vouloir concurrencer les micro-brasseries environnantes, ils veulent permettre l’aboutissement des projets brassicoles de tout-un-chacun. Et Armand Heitz y a vu une opportunité : pouvoir produire de la bière librement et sous le regard de gens experts avec des produits en accord avec la logique de polyculture du domaine.
Ainsi s’est décidé qu’il sera produit deux gammes différentes à la Brasserie de France pour le compte d’Armand Heitz. La première sera une gamme classique, simple, avec pour point d’intérêt le travail de la céréale locale : l’une au blé, l’autre au seigle et la troisième au sarrasin. Le but est de faire découvrir ou redécouvrir ces céréales locales à travers la bière et de les distribuer au plus grand nombre afin de montrer qu’une bonne bière ce n’est pas forcément belge ou allemand d’une part et que ce n’est pas non plus quelque chose à boire sur un roof-top parisien entouré de bobos. Le terroir peut se retrouver dans la bière locale et accessible et cette collaboration entend bien le démontrer.
Cela m’amène donc à la deuxième gamme, les bières de climat. Ce seront des bières élaborées en accord avec les principes viticoles, associant une base de bière et des raisins de différentes appellations qui seront ensuite affinés dans des ex-fûts de vins du domaine. Cette gamme, adressée à un public plus averti sera l’occasion de s’affranchir des barrières entre le vin et la bière, de montrer que ces deux produits peuvent se marier au gré de possibilités infinies. Ce sera bien sûr également l’occasion d’inscrire durablement l’empreinte du domaine dans le monde brassicole avec des bières de garde pensées comme certains grands vins.
Pour revenir à ce fameux partenariat, le domaine Armand Heitz est très fier de cette collaboration et se veut transparent de bout en bout quant à l’élaboration de celui-ci. Le but est autant d’éduquer le consommateur à boire des bières locales et plus proches du terroir que de se donner des possibilités d’évolutions et d’ajustements grâce à l’appareil productif de la brasserie, son état d’esprit et sa flexibilité. Au grand dam de beaucoup d'amateurs de bière acharnés, il est possible et parfois nécessaire de se servir de machines relativement imposantes pour faire de la qualité et il serait même bien dommage de s’en priver.
La théorie selon laquelle ce sont forcément des appareils productifs qui font vivre une ou deux personnes qui aboutissent aux meilleurs produits est fallacieuse et d’une certaine malhonnêteté intellectuelle. En effet, les amateurs de bières vont s’offusquer de la taille d’une telle machine mais vont derrière bien souvent aller consommer des bières de brasseries de grande ampleur venues d’Amérique, d’Angleterre ou d’ailleurs sans même le savoir. Je fais ici référence aux cadors du mouvement craft beer ; Cloudwater, Other Half, Omnipollo, Verdant et tant d’autres brasseries qui brassent certes de magnifiques produits mais qui n’en restent pas moins des machines imposantes aux premiers abords.
En bref, l’idée de ce projet est bien de produire une qualité identifiable et en adéquation avec les valeurs du domaine, de séduire les amateurs de bière, de vin ou les consommateurs moins réguliers de ces produits, de rapprocher chacun d’un but commun : consommer mieux sous tous les aspects. Mettre toute l'expertise conjointe entre le domaine Armand Heitz et la Brasserie de France pour répondre à ces objectifs et rester dans la cohérence que le domaine a toujours cherchée : produire une qualité optimale tout en restant fidèle à la cohérence naturelle et sociale globale.
Les bières Armand Heitz sont à retrouver ici et au Cellier de Pommard.
Grégoire Blanc